Avis
Au début, tout se passe comme si on découvrait un reportage sur le travail des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse : on suit le quotidien de Marc, l’âpreté des décisions à prendre, la solidarité au sein des équipes, l’impossible accoutumance à la souffrance des « sales gosses » qu’ils accompagnent. De Marc on passe à Wilfried, l’un de ces enfants, dont l’itinéraire devient le cœur du récit. Placé à huit mois dans une famille d’accueil, on le retrouve quinze ans plus tard, alors qu’il vient de se faire exclure du club de football professionnel qui l’avait repéré : il a frappé un adversaire sur le terrain. La colère qui l’a écarté des terrains devient indomptable dans le retour au quotidien de la banlieue et de la famille d’accueil, alors son chemin croise de nouveau celui des éducateurs de la PJJ. Avec son écriture sèche, qui ne recherche pas l’effet, Mathieu Palain joue avec les codes du reportage et ceux du roman : comme la psy que l’on rencontre au début du récit, le narrateur fait tout pour éviter de juger. Aucun misérabilisme, aucun lyrisme : l’auteur se contente de manier avec subtilité le pouvoir qu’a l’écriture romanesque de saisir les ressorts intimes de chaque personnage, et ainsi leur émouvante humanité. C’est passionnant, c’est rude, et c’est beau…
Mélanie