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Avis

Donner la parole à celles que des hommes ont traitées en objets au service de leur satisfaction, à celles que personne ne consulte pour décider comment le crime commis sera puni : c’est ce que fait cette fiction qui s’insère dans le blanc d’un terrible fait divers réel. Dans une communauté mennonite isolée du reste du monde, en Bolivie, presque toutes les femmes, jeunes filles et petites filles ont été victimes de viols perpétrés la nuit par plusieurs hommes de la colonie utilisant des anesthésiants vétérinaires pour les plonger dans l’inconscience. Au fond, c’est aussi sur l’oubli que misent leurs maris, frères et fils pour que cet épisode n’empêche pas la vie autarcique de reprendre son cours immuable. Mais les femmes se rassemblent. Leur sort, cette fois, doit être entre leurs mains : c’est le débat de huit d’entre elles, réunies dans un grenier à foin, qui est consigné dans le récit. Partir ? Rester et se battre ? Rester et renoncer à se battre ? Miriam Toews, avec un respect infini pour chacun de ses personnages, fait entendre leurs voix, dans toutes leurs nuances, leurs dissonances, leur justesse, leur fragilité. Invité à les écouter, le lecteur ressent avec force la souffrance et le courage de ces femmes : sans aucun dogmatisme, ce récit très singulier constitue à la fois une leçon de féminisme et une réflexion émouvante sur le vivre ensemble.

Mélanie

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